mercredi 29 octobre 2008

Putain de banques !

Qu’est-ce que c’est que ce monde où il n’y a que le fric qui compte ?
Le fric des riches bien évidemment, mais aussi l’argent des pauvres. Pourquoi pas, l’argent c’est toujours de l’argent !
Qu’est-ce que c’est que ce monde des traders, mot barbare s’il en est.
J’entends partout qu’il faut sauver les banques pour qu’elles soient capables de réinjecter du crédit dans l’économie réelle. Vraiment ça me fait marrer. Quand je vois ce que les patrons de banques, les actionnaires, se mettent dans les poches, je doute que leur souci principal soit de sauver les petites PME et de permettre aux petites gens de survivre. Ce monde de l’argent est sans conscience. Pire, il sacrifie ce qui fait la dignité du peuple : le désir de vivre normalement.
Quand je songe à la misère du monde, à ces peuples en détresse, affamés, je me demande comment ces patrons de banques peuvent encore oser négocier des parachutes dorés.
Il faut quand même le redire, même si c’est démodé, l’argent ne donne pas de sens à la vie. Redisons-le : l’argent est un moyen de rendre les choses plus justes. Or, cette crise mondiale montre que l’argent ne crée que des injustices. Ce monde-là est dégoûtant et en plus c’est un monde de tricheur.
Tout de même ! Que l’Etat réinjecte des milliards dans cette nébuleuse alors que cette nébuleuse a appauvri presque la majorité de l’humanité pour n’enrichir que quelques-uns, c’est d’une absurdité absolue, d’une indécence totale. Ce monde-là ne mérite que notre mépris. Souvenons-nous du Crédit Lyonnais et de tant d’autres scandales. Ce sont toujours les mêmes qui paient l’addition : les plus modestes. Il n’y a vraiment pas de quoi montrer sa tête à la télévision mais bien plutôt se cagouler de honte.
Philippe Faure

P.S. Pour endiguer la faim dans le monde, il faudrait débloquer 3 milliards de dollars. Les gouvernements viennent de débloquer le plus naturellement du monde 180 milliards de dollars pour, soi-disant, sauver l’économie.

mardi 28 octobre 2008

Création de La Petite Fille aux allumettes


Ce samedi 25 octobre se sont achevées les premières représentations de La Petite Fille aux allumettes. Le spectacle sera repris du 3 au 31 décembre 2008.
Je dois admettre que ces premières représentations ont reçu un accueil formidable. Le "bouche à oreille" a immédiatement fonctionné et les salles étaient pleines. Quel plaisir tous les soirs d’accueillir ces enfants, ces familles, ces pères, ces mères, ces grands-parents, mélangés en une foule désireuse ! Plus que d’un public populaire, on pourrait évoquer la notion de "rassembler". Au fond, ce spectacle a rassemblé toutes les générations. Magnifique de retrouver cet enjeu du théâtre !
Le plaisir fut d’autant plus grand que cette création fut très difficile à mettre au point. Nous avons, l’équipe artistique et moi, traversé, non pas des périodes de doute, mais des périodes d’extrême difficulté. Car il faut bien le dire, donner à voir l’œuvre d’un poète n’est pas chose simple et la rendre accessible à des enfants à partir de 8 ans est un souci permanent. D’autant qu’il convient que les adultes y trouvent aussi "leur compte". Jamais je n’ai autant remis en chantier un spectacle, et lors des cinq premières représentations, nous n’avons cessé, tous les après-midi, de travailler sur des raccords. Le dernier jour, inventant même une scène collective dans le spectacle.
Mais au-delà du travail purement théâtral, il y a bien sûr l’humeur, l’état du metteur en scène qui agit sur l’imaginaire du spectacle et, il faut bien le dire, au moment d’aborder les répétitions en juin, et jusqu’au milieu du mois de juillet, l’humeur et l’état du metteur en scène n’étaient pas des plus heureux. Et quand le malheur est là, comment inventer la légèreté ? Dieu soit loué, la longue nuit s’achève et la clarté du jour réapparaît. Du coup, cette légèreté-là a envahi tout le spectacle, et des craquements d’allumettes de la petite fille est né un monde aérien qui, me semble-t-il, tous les soirs, a donné au public l’envie d’aimer délivrée de toute souffrance.
Philippe Faure

L’artisan et le mendiant

Il y a, d’une part les collectivités territoriales (Ville, Conseil général, Région) et d’autre part, le Ministère de la Culture avec un ministre à Paris et un directeur de DRAC à Lyon.

Les rapports avec les collectivités territoriales sont basés sur une vraie confiance. Nous travaillons dans une ville, au cœur d’une région. Nous sommes dans le concret de notre action et celle-ci peut être jugée sur le terrain à tout moment. La Croix-Rousse file vers les 10.000 abonnés. Elle a un taux d’autofinancement d’environ 60 %. Elle programme la plupart des metteurs en scène significatifs d’une esthétique : de Bruno Meyssat à Patrice Chéreau, de Bruno Boëglin à Richard Brunel, de Emilie Valantin à Laurent Pelly… Ses propres productions sont systématiquement suivies de longues tournées (entre 80 et 150 représentations pour chaque création). Tout cela fait l’objet d’un dialogue permanent avec les élus de tous bords.

La relation au Ministère de la Culture est d’un tout autre ordre puisqu’elle nous impose une posture de mendiant. Que mendions-nous ? Un vrai dialogue, une vraie honnêteté intellectuelle (Ah ! cette façon qu’a l’Etat de gagner du temps en diligentant des inspections, des audits, en fixant des échéances sans cesse contrariées, en se contredisant même entre la DRAC et le cabinet du ministre : l’un affirmant des décisions, l’autre les diluant dans le temps). Des mendiants parce que l’Etat nous impose une solitude assez vertigineuse. Nous sommes seuls face à ce monde de conseillers, de chefs de cabinet, de directeurs, de sous-directeurs, presque toujours à la recherche de la meilleure technique d’évitement.

Parfois (comme c’est le cas ici), un préfet de région (Jacques Gérault en l’occurrence) vient à notre secours, et alerte fermement notre ministre sur notre situation ubuesque.

Au fond, et Jérôme Bouët, ancien directeur de la DRAC, l’avait très précisément dit dans une interview, en parlant de l’époque où il était directeur de la DMDTS : « De Paris, on ne peut pas se rendre compte du travail d’un Philippe Faure à Lyon. » Il décida de faire de la Croix-Rousse une scène nationale (voir diverses interviews). Aussitôt le rapport Paris/Province se pose et son extrême déséquilibre. Là encore, nous mendions un rééquilibrage des moyens et des décisions.

Qu’on me comprenne bien, il n’y a pas de honte à être un mendiant et la brutalité de l’époque en jette dans les rues en quantités industrielles. Ce qui est dérangeant, pour ne pas dire insultant, c’est que le Ministère de la Culture crée ses mendiants. Pour reprendre l’expression fameuse de François Mitterrand : « le Ministère de la Culture a ses pauvres à lui. »

Tout de même, que faisons nous ici à La Croix-Rousse (et tous les autres ailleurs) si ce n’est défendre un service public, assumer une mission d’intérêt général ? L’Etat lui ne mendie pas, il se sert. Il fait les poches des collectivités territoriales et il nous regarde d’en haut en ne comprenant pas notre tristesse à mendier. Le pire dans tout cela, c’est que nous ne sommes plus en colère, nous ne sommes plus dans le combat. Comme "la petite fille aux allumettes" d’Andersen, nous tendons la main dans le froid de l’hiver. L’Etat, lui, a mieux à faire que de nous prendre la main, il sauve les banques.

Dieu soit loué (si j’ose dire), nous avons toujours assumé nos responsabilités, nous avons toujours payé de notre personne, nous n’avons jamais cherché à gagner du temps, à élaborer des stratégies tortueuses. Nous sommes là pour faire entendre la parole des poètes, pour que les metteurs en scène inventent le théâtre d’aujourd’hui, pour que les comédiens soient confrontés aux grands rôles. Nous sommes là pour que le public partage notre aventure. Peut-être le temps viendra-t-il où le Ministère de la Culture acceptera et décidera que nous sommes les artisans de cet art si mystérieux et si impalpable qu’est le théâtre ? Alors nous pourrons ranger dans nos malles d’osier nos oripeaux de mendiants et au hasard d’un Shakespeare, nous les ressortirions pour créer de vrais mendiants de théâtre.
Philippe Faure

À paraître dans La Tribune de Lyon le jeudi 30 octobre 2008.

mercredi 22 octobre 2008

En rentrant de la première de La Petite Fille aux allumettes… Sœur Emmanuelle m’attendait dans l’écran de la télévision

Hier au soir, en rentrant tard de la première de La Petite Fille aux allumettes, j’allume la télévision et je tombe sur une rediffusion de l’émission de Michel Drucker « Vivement dimanche », émission enregistrée il y a huit ans, toute entière consacrée à Sœur Emmanuelle.
A cette heure-là de la nuit, ça fait une drôle d’impression d’entendre cette femme de presque quatre-vingt-dix ans parler du monde en employant des mots aussi simples que : générosité, fraternité, amour, solidarité, homme debout ; de la voir applaudir comme une gamine à tous les chanteurs invités par Michel Drucker ; accueillir des gens comme Boutros Boutros-Ghali (ancien Secrétaire général de l’ONU), Xavier Emmanuelli (type assez remarquable, co-fondateur de Médecins sans frontières et fondateur du Samu social) avec une ferveur malicieuse ; rire à gorge déployée à tout bout de champ.
Stupéfaction pour moi dans cette émission : C. Jérôme chantait ! C’est donc qu’il y a huit ans il était encore vivant.
Quelques heures auparavant, l’OL battait Bucarest cinq buts à trois et devenait un grand d’Europe.
Encore un peu avant, la première représentation de La Petite Fille aux allumettes fut très tendrement reçue.
Dehors, il pleuvait.
J’ai l’impression que Sœur Emmanuelle et Andersen : même combat. Prendre soin de tous les êtres blessés par la vie, les consoler et leur donner la force de vivre, quitte à les ressusciter s’ils sont déjà morts. Plus tard, dans le journal de la nuit, on nous expliqua que Sœur Emmanuelle (très finaude) avait enregistré le message publicitaire de ses mémoires. Je n’irai pas jusqu’à dire qu’elle s’est plus fait confiance qu’elle n’a fait confiance aux résurrections divines. Quelle soirée !
Philippe Faure

Andersen et Zola selon Marc Voisin


Andersen et Zola. Quel jeu de correspondances, peut-on trouver chez ces deux auteurs à priori très éloignés ? Que nous révèlent-ils ?
Zola sonde l’être humain « comme un scientifique », disait-il. Il fouille ses entrailles à la façon d’un entomologiste pour y trouver la part animale, qui nous entraîne irrémédiablement, y compris dans les zones les plus sombres. Il traque la bête dans le ventre chaud.
C’est un voyage intérieur. Nous sommes au plus près de l’intime. Un voyage mental qui nous entraîne dans un univers carcéral. C’est en partant des replis de notre chair que Zola raconte notre monde.
Andersen prend un chemin, pour ainsi dire, inverse. Chez Andersen, c’est le monde, le vaste monde dans son intégralité qui prend la parole. Le vent, la poussière dont on fait les étoiles, les fleurs, les insectes ; jusqu’aux objets les plus anodins. Une grande galerie de petites choses muettes, fragiles ou ignorées qui se racontent, prennent corps, vie et sens. Une féerie, sombre souvent, qui nous ouvre les yeux, qui réinvente notre perception du monde et l’élargit. Les choses les plus communes ont une grâce de nouveauté pour qui sait les voir, comme disait l’autre. Pour qui veut bien prêter attention à Andersen, ce sont alors les petites choses de ce vaste monde qui nous révèlent à nous-mêmes.
Un trajet inverse donc entre ces deux poètes. Deux espaces fictifs différents. Deux gauchissements de la réalité. Mais, et c’est là, me semble-t-il, que se joue les correspondances. Un souci commun chez ces deux hommes si fébrilement en prise avec leur monde, grands observateurs et grands sensibles, de sonder l’état de l’être humain plongé dans son monde, sa présence aux autres (non-présence souvent), sa solitude, la misère qu’elle génère. Et partout à l’œuvre en filigrane, le manque et la quête d’amour.
Marc Voisin, interprète de Laurent dans Thérèse Raquin et du hussard et de l'ange dans La Petite Fille aux allumettes.

lundi 20 octobre 2008

Un week-end (veille de première) à La Croix-Rousse

Il a fait très beau ce week-end. Un soleil d’automne à nul autre pareil, et pourtant toute l’équipe de La Petite Fille aux allumettes est restée enfermée dans le théâtre jusqu’à tard dans la nuit.
Et là, qu’avons-nous fait ? Nous avons lancé de la fausse neige dans le décor du spectacle, nous avons donné vie à un bonhomme de neige, à des crapauds, à une sorcière, au vent, à un vieux réverbère et à tant d’autres personnages d’Andersen. Il faut dire que ce week-end d’automne, nous étions, nous, sur le plateau, la veille du jour de l’an et qu’une petite fille, pieds nus, grelottait dans le froid. C’est quand même assez fou dans la manière que le théâtre a de décaler le temps !
Malgré cet enfermement forcé, chacun n’a eu de cesse de me dire que j’avais retrouvé un teint de bébé. Ce qui est sûr, c’est que le soleil n’y est pour rien. Ce sont les globules rouges transfusés à l’Hôpital de la Croix-Rousse les seuls responsables de cette métamorphose.
Vive les globules rouges !
Enfin ! je n’ai plus ce teint quasi mortifère qui faisait peur à tout le monde. Est-ce une conséquence ? Mais il y eut cette invitation à dîner de Virginie, si belle, si élégante, tout en noir, avec quelque chose de délicat dans la façon qu’elle a de vous regarder. Décidemment la délicatesse est un des plus beaux mots de la langue française.
Finalement, ce soleil d’automne, cette fausse neige, ces crapauds, ce teint rose retrouvé et cette délicate jeune femme apparue, tout cela, plus qu’un week-end de vogue, inspira mon travail, et le filage de dimanche soir fut un filage serein. On pouvait avoir l’impression de s’être abandonné au monde d’Andersen (à moins que ce soit lui qui fut venu à nous).
Philippe Faure

jeudi 16 octobre 2008

Bienvenue !

C'est une sorte de journal intime que j'invente sur ce blog. Rien de ce qui ne se passe dans un lieu comme un théâtre ne peut être détaché de la vie heureuse ou malheureuse de celui qui l'anime.
Bienvenue !
Philippe Faure

mardi 14 octobre 2008

De l’utilité de ne pas être mort


Un accident de santé a failli avoir raison de ma vie. La mort m’a frôlé. Je suis donc par la force des choses, un autre. Un survivant. Et de cette vie nouvelle, deux évidences surgissent.
D’abord il me faut absolument être utile, de là où je suis : responsable d’une institution théâtrale. Toute idée égoïste m’est insupportable. Je me dois d’être au service des autres plus que jamais. Le théâtre est l’art de donner une âme à toute idée qui s’occupe d’humanité et ces idées sont portées par les poètes. Alors oui, je suis utile à donner à entendre la parole des poètes et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que les poètes ne soient pas sacrifiés à la réalité de la crise.
La seconde évidence, c’est que seul l’amour nous donne la dignité d’être vivant. Je veux ignorer (dans ce monde en plein désarroi), les ricanements, les indifférences, les petits arrangements avec eux-mêmes de ceux pour qui l’amour n’est pas notre seule vraie responsabilité.
Quand on a failli être mort, on se demande à quoi l’on a servi sur terre. Et bien moi, je veux servir les poètes et l’amour. Fébrile de la vie qui m’a retenu, j’ose dire : ayons l’audace d’être utile et ne laissons pas la mesquinerie, l’orgueil, l’insatisfaction, la lâcheté, la vanité, le narcissisme nous détourner de notre devoir : Aimer être utile. Il est utile d’aimer.

Toute la saison de La Croix-Rousse/Scène nationale de Lyon (et tout le reste) est dédiée à Laurence Guedj qui fut la douceur et la force incarnée et qui envers et contre la maladie porta haut l’esprit de notre théâtre. Nous sommes avec elle.
Philippe Faure

Guillaume Depardieu est mort


Il y a quelques semaines, j’avais eu la chance de le rencontrer. C’était pour moi l’acteur le plus génial de sa génération, au même titre que Patrick Dewaere. Je lui avais proposé le rôle de Tartuffe et il était intéressé.

C’était un de ces êtres que j’admire plus que tout au monde, tout en fébrilité, tout en élans, tout en amour, tout en peur, tout en courage, tout en douceur, tout en secret.
Un de ces êtres qui nous donnent envie de nous surpasser, de nous dépasser.
Un de ces êtres qui ne cherchent pas à être peinard, planqué, intégré, codé, mais au contraire qui considéraient que la vie ne mérite pas d’être petite et mesquine.

Sa mort me bouleverse. Il y a tant de faiseurs, tant de "petits bras", tant de médiocrité, tant de vacanciers que le jour où un innocent meurt, on peut avoir l’impression que c’est le monde entier qui s’écroule.

Je pense au chagrin de son père, lui aussi acteur admirable, je pense à cette famille hors norme. J’ai son numéro de téléphone sur une page de mon agenda, il ne me répondra plus jamais. C’est à pleurer et je pleure.
Philippe Faure

lundi 13 octobre 2008

Monter La Petite Fille aux allumettes aujourd'hui


Le mot de récession est lâché depuis ce matin sur les ondes, à la télévision et dans la presse.
C’est donc que nous allons aborder (quand je dis nous, c’est le pays et le monde entier) une période extraordinairement dure économiquement et où le nombre des exclus va gonfler au fur et à mesure.

Evidemment, les plus pauvres vont rester encore plus pauvres, les plus fragiles vont devenir à leur tour pauvres, et les classes moyennes vont considérablement réduire leur train de vie pour aller uniquement à l’essentiel et ne pas risquer elles-mêmes de glisser vers la pauvreté.

Aussi, je me suis dit ce matin que créer La Petite Fille aux allumettes n’est plus du tout un acte innocent. Cette création, me semble-t-il, nous investit d’une responsabilité tout à fait nouvelle. Car au fond, grâce à Andersen, ce court spectacle va résumer la situation du monde. Les pauvres auront beau tendre la main, ceux qui ne sont pas encore pauvres n’auront ni le temps, ni le désir de prendre cette main. Ils passeront leur chemin en priant de ne pas être touchés eux-mêmes par la crise. Et puis, peut-être, au delà de ce constat, cette histoire pose la question de la parole des poètes. A quoi sert-elle en des temps troublés et dramatiques ? Bien sûr, à s’échapper de la réalité, mais aussi sans doute à rêver à un monde meilleur et plus juste. Un monde où les crapauds, les bonshommes de neige, les vents, les lampadaires, auraient le pouvoir de transformer la vie.
Philippe Faure

Diptyque : La Petite Fille aux allumettes suivie de Thérèse Raquin


La Petite Fille aux allumettes ainsi que Thérèse Raquin, adaptées pour le théâtre par Philippe Faure, viennent de paraître dans un même ouvrage aux éditions la passe du vent (9€).
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Dans Thérèse Raquin, Thérèse et Mme Raquin ont une petite mercerie, dans une impasse pluvieuse. Tout cela ne respire pas le luxe. Dans La Petite Fille aux allumettes, évidemment celle-ci est obligée de vendre des allumettes à ses clients indifférents pour ne pas se faire battre par son père et gagner quelques sous pour se nourrir.
Émile Zola et Christian Hans Andersen nous disent à leur manière qu’on échappe pas à son destin. Dès que Thérèse rencontrera Laurent, son avenir sera inéluctable. Quant à la pauvre petite fille aux allumettes si pauvre, si seule, elle mourra de cette pauvreté et de cette solitude.

Malgré tout, et Zola et Andersen, à travers le mystère des destins, nous disent que rien n’est pire que la tranquillité de la vie. Souvenons-nous de Musset et de On ne badine pas avec l’amour : "Mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime (…) J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice, créé par mon orgueil et mon ennui."

Histoires d'une saison par Philippe Faure


Duras. Dominique Blanc. Patrice Chéreau
à la Croix-Rousse. Juste pour deux représentations. Ce n’est même plus un événement. Ça tient du miracle. Jean-Marc Avocat et Racine. Ça tient du Phénomène. Après une Bérénice à guichets fermés la saison dernière, lui est apparu le désir fou d’une trilogie. Avocat possède une force intérieure qui nous sidère tous _ Pascal Mengelle et son Macbeth. On garde le souvenir ébloui de l’un de ses précédents passages chez nous avec Van Gogh le suicidé de la société (Arthaud) _ On ne badine pas avec l’amour (Musset). Quatrième saison. Comment quitter une histoire d’amour aussi profonde ? Impossible. Alors on file vers les 150 représentations… Ainsi on gagne du temps _ Laurent Brethome (Feydeau) on se souvient de son "Levin". Ça risque d’être du "brutal". D’être humain et drôle aussi. Il est comme ça Brethome _ Joris Mathieu / Volodine et leur trilogie. C’est à voir parce que ces images-là n’existaient pas encore au théâtre, avant eux _ Laurent Gaudé qui puise dans le passé les blessures d’aujourd’hui _ Thérèse Raquin / Zola. C’est un compagnonnage à la vie à la mort, si j’ose dire _ Sartre / Camus enfin à la Croix-Rousse. Nous rêvions de les donner à entendre. Deux œuvres fondamentales et si rarement jouées. Les Justes, Les Mains sales. Quand le théâtre osait encore poser des questions qui nous dépassent _ De la danse. Deux spectacles. Grâce à Guy Darmet que nous aimons d’amour. Et oui ! _ Du cirque (Hirsute) pour la première fois à la Croix-Rousse. Et en plus l’équipe est d’ici, de Die ! _ De l’opéra ! Pourquoi pas ! Là aussi une première. Une histoire bouleversante : Jérémy Fisher ! _ Du Hip Hop ! Nous le voulions absolument. Le camarade Emmanuel Daumas est de l’aventure. Chic ! Il était un acteur génial dans Le Roi nu de Laurent Pelly _ Guitry. Ah oui ! Guitry et sa folie à nulle autre pareille. Une histoire d’adultère pas piqué des vers _ Andersen et sa Petite Fille aux allumettes. Andersen et son monde invraisemblable mais si humain _ Dominique Pitoiset, dont nous admirons les mises en scène (souvenons-nous de Sauterelles de Biljana Srbljanovic), ici avec Wajdi Mouawad, enfin chez nous _ Omar Porras encore et toujours. Après tous ses triomphes chez nous et ailleurs (Maître Puntila et son valet Matti, le dernier en date) Les Fourberies de Scapin / Molière. Ça promet _ Et pour finir (ou plutôt pour commencer) du Flamenco. Vivement l’avenir !
Philippe Faure